113
du Roi. Quelques devoirs que je fisse pour pousser ma sollici-
tationelle ne fust pas mise sur le tapit dans les commencements
de cette assemblee, laquelle se sépara pour trois semaines.
Peu de jours avant la Noël, le mesme jour que cette reso
lution fust prise, il faisoist beau terns avec un vent de oost;
ainsi plusieurs des Estats afferent faire une promenade le long
du quai. 3' en estois; nous i vismes un capre prest a sortir du
havre et dont le capitaine nous dit, que ce beau tems continuant,
il estoit d'intention de mettre le lendemain eu mer. Le beau
tems qu' il faisoit et 1' ennui que j' avois en Zélande, me
firent naistre 1' envie de me embarquer dans ledit capre, et aller
passer mes trois semaines auprèz de mon inaistre et dans la ville
de Londres. Je dis done a la compagnie avec laquelle je ine
promenais, que si j' avois de 1' argent, j' estois enclin a me
embarquer dans ce capre, et aller passer mon tems a Londres,
jusques a ce que les Estats seroient rassemblez. Nous allasmes
disner, comme je faisais ordinairementestant mesme logé dans
la maison de monsieur de Oudijck la conversation que j' avois
eue le long du quay, i fust répétée, et tout ceux de la table
me offrirent 1' or qu' ils avoist en poche, qui pouvoist monter
a cent cinquante guinnées. Je les remercie beaucoup et 1' ac-
ceptais. Je leur en donnais des biljets a ehaqu'un et fis ap-
prester mon equipage et le peu de provisions dont j' avois besoin.
En effect, après avoir pris congé de mes amis, je me embarquai
le lendemain a Ylissinge, vers le midi; nous entrasmes d' abord
en mer, et je mis pied a terre a Dover le lendemain longtemps
avant le jour, avec un batiment pêeheur, qui se trouva par ha
zard devant ce port. De la je pris la poste et arrivai avant
minuict a Londres, pour donner au Roi des lettres de mr. de
Oudijck et du conseiljer pensionaire. Le Roi eut la bonté,
comme a son ordinaire, de me bien recevoir. Deux jours après
mon arrivée a Londres, mon frère, qui avoist pris sa route par
le Goerée, comme je 1' ai déja marqué, i arriva aussi; il estoit
le plus estonné du monde de me trouver la. Après lui en avoir
fait le récit, nous i restames ensemble environs un moisau bout
duquel tems, après avois pris mon congé du Roi et de mes
amis, je me embarquais dans une fregatte, laquelle convojoist
Archief 1916. 10