13.
Veere, le 7 aoüt 1869.
Chère mère et soeur!
Pardonnez-moi de n'avoir pas encore répondu a votre bonne lettre.
Je n'ai plus une seule minute a moi. A part le temps nécessaire pour
manger et dormir, mon temps est consacré aux travaux. Nous travaillons
depuis 2 mois de 41/ó du matin jusqu'a 81/j> h du soir et presque sans
interruption. Encore quelques jours tout au plus deux semaines nous
allons travailler jour et nuit pour couler le béton. 1C'est alors que nous
aurons de la besogne.
En tout cas, je ne me plaint pas. Ces messieurs sont très-honnêtes
pour moi et ils font tout pour nous donner de temps en temps quelques
délassements. C'est surtout les dimanches, comme vous le pensez bien
qu'on peut se rendre la vie un peu tolérable.
Vous parlez2) de la mort de mon meilleur ami: Henri Oosterbosch.
J'ai été vivement touché par cette triste nouvelle; c'était comme si un de
mes membres était violemment arraché. Je peux bien me figurer la tris-
tesse de sa familie [et] de la jeune demoiselle avec laquelle il était engagé.
C'est une perte douloureuse, un vide énorme, qu'il laisse derrière lui. Moi
j'ai regu tant de preuves de sa fidéle amitié et je puis dire hardiment que
le défunt avait le meilleur coeur du monde. Je ne doute nullement que
tous les amis de I.iège ne sentent vivement cette perte, et qu'il est fort
regretté parmi ces jeunes gens.
Mais faut se soumettre a la volonté du Tout-Puissant; nous n'avons
qu'a bénir les desseins de sa sagesse prévoyante.
Ma chère mère, le temps me manque en ce moment pour vous écrire
plus longuement. Croyez pourtant que je m'empresserai de reprendre une
nouvelle lettre, dès que je pourrai disposer d'une heure de temps.
Je vous embrasse
Votre fils et frère
M. Ghijsen
Je vous joins 60.a cette lettre.
1) Zie ook brief 14.
2) Deze brief van zijn moeder bleef niet bewaard.
68